Encyclique MEDIATOR DEI
de Sa Sainteté le Pape PIE XII
SUR LA SAINTE LITURGIE
III. LES FÊTES DES SAINTS
Dans le cours de l’année liturgique, ce ne sont pas seulement les mystères de Jésus-Christ, ce sont aussi les fêtes des saints du ciel qui sont célébrées. Par ces fêtes, l’Église poursuit toujours, quoique dans un ordre inférieur et subordonné, le même but : proposer aux fidèles des modèles de sainteté, sous l’impulsion desquels ils se revêtent des vertus du divin Rédempteur.
Ils nous sont proposés comme des exemples…
Nous devons être, en effet, les imitateurs des saints du ciel, dans la vertu desquels resplendit à des degrés divers la vertu même de Jésus-Christ, comme ils furent eux-mêmes ses imitateurs. Dans les uns a brillé le zèle apostolique, dans les autres, la force de nos héros poussée jusqu’à l’effusion du sang. Chez certains, se remarque une constance ininterrompue à attendre le Rédempteur ; chez d’autres, une pureté d’âme virginale et la modestie suave de l’humilité chrétienne. Tous brûlèrent d’une très ardente charité envers Dieu et envers le prochain.
Toutes ces gloires de la sainteté, la sainte liturgie nous les met sous les yeux afin que nous les contemplions avec fruit et que " nous réjouissant de leurs mérites nous soyons entraînés par leurs exemples " (Missale Rom., Coll. III Missae pro plur. Martyr. extra T. P.). Il faut, par conséquent, conserver " l’innocence dans la simplicité, la concorde dans la charité, la modestie dans l’humilité, le soin dans l’administration, l’attention à soulager ceux qui peinent, la miséricorde dans le secours aux pauvres, la fermeté dans la défense de la vérité, la justice dans le maintien sévère de la discipline, de sorte qu’il ne nous manque rien des bonnes œuvres proposées à notre imitation. Ce sont là les traces que les saints, dans leur retour à la patrie, nous ont laissées, afin que, nous attachant à leurs pas nous parvenions aussi à leurs joies " (S. Bède le Vénérable, Hom. suid. LXX in solemn. omnium Sanct.). Or, pour que nos sens eux-mêmes soient salutairement impressionnés, l’Église a voulu qu’on exposât dans nos temples les images des saints du ciel, mais toujours dans le même dessein, afin que " nous imitions les vertus de ceux dont nous honorons les images " (Missale Rom. Collecta Missae S. Ioan. Damascen.).
… et comme nos intercesseurs
Il y a encore un autre but au culte que le peuple fidèle rend aux saints du ciel : c’est celui d’implorer leurs secours, en sorte que " nous complaisant à les louer, nous trouvions aussi un secours dans leur patronage " (S. Bernard, Sermo II in festo omnium Sanct.). On s’explique par là, aisément, les nombreuses formules de prière que nous propose la sainte liturgie pour implorer le secours des saints.
Culte prééminent envers la très Sainte Vierge
Parmi les saints du ciel, la Vierge Marie, Mère de Dieu, est l’objet d’un culte plus relevé. Sa vie, en effet, de par la mission qu’elle a reçue de Dieu, est étroitement liée aux mystères du Christ, et personne, assurément, n’a suivi de plus près et plus effectivement qu’elle les traces du Verbe incarné ; personne ne jouit d’une plus grande faveur et d’une plus grande puissance qu’elle auprès du très Sacré Cœur du Fils de Dieu, et par lui, auprès du Père céleste. Plus sainte que les chérubins et les séraphins, elle jouit d’une gloire supérieure à celle de tous les autres saints, parce qu’elle est " pleine de grâce " (Lc I, 28) et Mère de Dieu et nous a, par son heureuse maternité, donné le Rédempteur. Puisqu’elle est " Mère de miséricorde, notre vie, notre douceur et notre espérance ", crions vers elle nous qui " gémissons et pleurons dans cette vallée de larmes " (Salve Regina), et mettons-nous avec confiance sous son patronage, nous et tout ce qui nous concerne. Elle est devenue notre Mère au moment où le divin Rédempteur accomplissait le sacrifice de lui-même, en sorte que voilà encore un titre auquel nous sommes ses enfants. Toutes les vertus, elle nous les enseigne. Elle nous donne son Fils et, avec lui, elle nous donne tous les secours dont nous avons besoin, car Dieu " a voulu que nous ayons tout par Marie " (S. Bernard, In Nativ. B. M. V., 7).
Tel est le chemin liturgique qui s’ouvre à nouveau devant nous tous les ans, et que s’applique à nous faire parcourir l’Église, ouvrière de sainteté. Aidés des secours et fortifiés par les exemples des saints du ciel et, en particulier, de l’Immaculée Vierge Marie, suivons ce chemin et " dans la plénitude de la foi, le cœur purifié des souillures d’une mauvaise conscience et le corps lavé dans une eau pure, avec un cœur sincère, approchons-nous " (He X, 22) du " Grand Prêtre " (Ibid., X, 21), afin de vivre avec lui et de nous trouver d’accord avec lui, de manière à pouvoir pénétrer avec lui " jusqu’à l’intérieur du voile " (Ibid., VI, 19) et y honorer pendant toute l’éternité le Père céleste.
Telle est la nature et la raison d’être de la liturgie. Elle a pour objet le sacrifice, les sacrements et les louanges à rendre à Dieu. Il lui appartient de même d’unir nos âmes au Christ et de leur faire acquérir la sainteté par le divin Rédempteur afin que gloire soit rendue au Christ, et par lui et en lui, à la très sainte Trinité. Gloria Patri et Filio et Spiritui Sancto.