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Dieu Amour
I. Les qualités de l'amour divin
1. Amour de Dieu le Père pour son Fils et du Fils de Dieu pour son Père
Le Père éternel parla ainsi par la bouche de sainte Madeleine de Pazzi17 : « l’âme de mon
Verbe, se tenant dans mon sein, me regarde et je la regarde moi-même avec un regard de
contemplation, d’admiration, d’amour, d’anéantissement, de pureté, de paix, de conseil, de
piété, de libéralité, de miséricorde, de justice, de bonté, de sagesse, de puissance, de
communication, de vérité, d’union, d’éternité, de clarté, de transformation et de glorification… O
ma fille, épouse de mon fils unique, écoutez attentivement, si vous voulez comprendre ce que
je vais vous dire : au moment où l’âme du Verbe entra dans mon sein (au jour de l’Ascension)
elle me regarda, mais d’un regard ineffable et incompréhensible pour vous, et ce regard fut pour
elle la source d’une joie immense.
Sans doute elle jouissait déjà de la gloire auparavant, puisqu’elle ne cessa de m’être unie
depuis son Incarnation, mais elle en reçut alors une auréole plus éclatante que je lui donnais en
récompense de la victoire qu’elle venait de remporter sur la mort et le péché ; comme aussi de
l’obéissance et de l’amour avec lequel elle avait accompli l’œuvre de votre Rédemption, que je
lui avais imposée, amour si ardent et si immense que nulle créature ne peut s’en faire une idée,
bien loin de le comprendre. La beauté de cette âme, rehaussée par la splendeur de cette gloire
nouvelle et par cet amour immense, que je voyais dans mon Verbe pour la créature, me plut
tellement, qu’au moment ou elle entra dans mon sein et fixa ses regards sur moi, je fixais aussi
les miens sur elle, et ce regard réciproque, qui rendit plus ardent ce foyer d’amour et plus
éclatante cette gloire de la divinité, fit jaillir sur la terre une abondante et ineffable rosée de
grâces…
Demande de l’âme : Dites-moi, je vous prie, ô mon Père, ce que le Verbe regardait dans
votre sein.
Réponse du Père : « Il regardait la divinité et l’égalité qu’il tient de moi, qui suis, en qualité
de Père le principe et la source vitale de la Très Sainte Trinité, à laquelle son âme était unie en
moi. Il regardait avec une complaisance infinie cette Essence divine qu'Il avait reçue de moi, et
son âme se contemplant en moi comme dans un miroir voyait les grâces immenses, les trésors
infinis qui Lui avaient été communiqués par cette union et qu’elle recevait à un titre nouveau en
vertu de ce regard. » (Ire part., ch. XXIV.)
2. Dieu nous a aimés avant de nous créer et cet amour est tout gratuit
Notre-Seigneur dit à sainte Catherine de Gênes18 : « Si tu savais combien j’aime les âmes
tu ne pourrais plus jamais savoir autre chose en cette vie ; car cette connaissance te ferait
mourir ; et si tu vivais, ce serais par l’effet d’un miracle… Mon amour est infini et je ne puis
qu’aimer ce que j’ai créé. La cause de mon amour n’est autre que lui-même, et comme tu n’es
pas capable de l’entendre, demeure en paix et n’entreprends pas de chercher ce que tu ne
saurais trouver. (Dialogue, IIe
part., ch. V, p. 347.).
Seigneur, disait la même sainte, qu’est ce donc que l’homme dont vous avez tant de soin !
Je ne sais si vous êtes son Seigneur ou son serviteur ; il semble que l’amour vous ait aveuglé à
tel point que vous ne connaissiez plus nos misères. Le Seigneur lui répondit : Tu demandes une chose si grande que tu ne saurais la comprendre ; mais pour contenter ton intelligence faible et
pauvre, je t’en montrerai quelque chose ; si je t’en donnais une plus claire vue, tu ne pourrais
vivre, à moins que la grâce ne te soutînt…
« Sache d’abord que je suis Dieu immuable et que j’aimais l’homme avant de le créer. Je
l’aimais d’un amour infini, pur, simple, sans cause aucune ; je ne puis pas ne pas aimer ce que
j’ai créé et destiné selon son degré à contribuer à ma gloire. De plus j’ai amplement pourvu
l’homme de tous les moyens convenables pour parvenir à sa fin. Je lui ai accordé des dons
naturels et des grâces surnaturelles, qui, de ma part, ne lui manquent jamais. De plus mon
amour infini l’entoure par divers moyens et voies afin de le soumettre à ma providence, et je ne
trouve rien qui me soit contraire que le libre arbitre dont je l’ai doué. Je combats toujours ce
libre arbitre par l’amour jusqu’à ce que l’homme me le donne et m’en fasse un présent ; puis,
après l’avoir accepté, je le réforme peu à peu par une opération secrète et avec un soin
amoureux et jamais je ne l’abandonne que je ne l’ai mené à la fin à laquelle il est destiné. » (IIIe
part., ch. 1er, p. 372.)
3. Dieu nous aime malgré nos défauts qu’Il combat sans cesse
« Quant à ton autre question : pourquoi j’aime cet homme qui m’est si contraire et qui est
plein de misères, dont l’infection monte de la terre au ciel, je te réponds : à cause de mon infinie
bonté et du pur amour dont j’aime l’homme, je ne puis m’arrêter à ses défauts, ni cesser de
faire mon œuvre, laquelle consiste à le combler toujours de bien. Je lui montre ses faiblesses à
ma lumière et les lui fais connaître ; lorsqu’il les connaît, il les pleure, et lorsqu’il les pleure, il
s’en purifie. Mais je suis offensé par l’homme lorsqu’il met obstacle à l’opération que j’ai
ordonnée pour le mener à sa fin, en d’autres termes lorsque mon amour ne peut agir selon les
besoins de la créature ; cet obstacle c’est le péché. Quant à cet amour que tu demandes à
connaître, tu ne saurais le comprendre, car il n’a ni forme ni mesure ; tu ne peux le connaître
par la voie de l’entendement, parce qu’il n’est pas intelligible ; il se connaît quelquefois par ses
effets. Quiconque qui n’aurait pas perdu la foi et verrait les effets que je produis dans les
hommes par ces rayons d’amour que je répands secrètement dans leurs cœurs, en serait
certainement enflammé à tel point qu’il ne pourrait vivre, car la véhémence de cet amour le
réduirait à néant. Quoique la créature soit presque toujours dans l’ignorance à cet égard, tu vois
cependant que poussés par cet amour inconnu, des hommes abandonnent volontairement le
monde, les biens, les amis, les parents ; les autres amours et les plaisirs leur deviennent alors
odieux. Cet amour porte l’homme à se vendre pour être esclave, à devenir sujet des autres
jusqu'à la mort ; il augmente tellement qu’il ferait endurer mille martyres, comme l’expérience le
fait voir continuellement. » (Dialogue, IIIe
part., ch. Ier.) .
17 Sainte Madeleine de Pazzi (1566-1607) fut carmélite, à Florence. Elle avait de fréquentes extases, pendant lesquelles elle faisait connaître ce que Dieu lui révélait. Parlant tantôt en son nom, tantôt au nom du Père, ou du Verbe ou du SaintEsprit. Six secrétaires écrivaient alors ce qui sortait de ses lèvres, puis quand elle était revenue de son extase, sur l’ordre de la Mère Prieure, elle révisait ce qui avait été écrit. (Œuvres, recueillies par le P. Brancaccio, traduites par Don Anselme Bruviaux, Paris, Palmé, 1873)
18 Sainte Catherine de Gênes (1447-1510) a écrit un traité du Purgatoire et les Dialogues. (Vie et Œuvres, par le vicomte de Bussières, 2e édition, revue par le P. Millet, Paris, Allard, édition Italienne, Gênes, 1847.)
4. L’amour de Dieu pour nous est toujours en éveil
L'Éternel dans son Ineffable clémence jeta sur Catherine (de Sienne)19 un regard plein de
tendresse et voulut lui expliquer comment la divine providence ne manque jamais à personne. Il
s’exprime ainsi : « O ma fille bien aimée, combien de fois te l’ai-je répété, oui je veux faire
miséricorde au monde et assister chacun selon ses besoins ; mais l’homme ignorant trouve la
mort où j’ai placé la vie et il se rend ainsi cruel à lui-même. Moi je veille toujours et je veux que
tu saches que ce que je donne à chacun est réglé par mon infinie providence. Avec ma
providence j’ai créé l’homme et quand je l’ai regardé en moi-même, je me suis passionné pour
la beauté de ma créature, car il m’avait plu de la créer à mon image et à ma ressemblance. »
(Dialogue, ch. CXXXV, n°1 et 2.)
Sainte Brigitte vit un jour, assis entre les saints sur un siège majestueux, Jésus-Christ, qui
19Sainte Catherine de Sienne (1347-1380) fut, pendant sa courte vie, l’une des saintes les plus favorisées de
communications célestes. Les unes nous furent transmises par le bienheureux Raymond de Capoue, son confesseur à qui la
sainte les fit connaître ; les autres furent recueillies par ses secrétaires pendant ses extases, et formèrent le Livre de
la divine doctrine ou le Dialogue. Alors, en effet, Dieu le Père parlait en elle et elle répondait. (Dialogo della divina
Providenza, nuova edizio secondo un inedito codice,Bari, 1912, et traduction Cartier, Paris, Lethielleux, 19°3 ; Vie, par la
Comtesse de Flavigny, Paris, Santon, 1880.)
lui dit ces paroles : « Je suis la vraie charité ; tout ce que j’ai fait de toute éternité je l’ai fait par
amour ; de même tout ce que j’ai fait et ferai procèdera de mon amour. Mon amour est aussi
grand et aussi incompréhensible maintenant qu’il l’était le jour de ma passion, quand par ma
mort, dans un excès d’amour je délivrai des limbes tous mes élus. S’il était possible que je
mourusse tout autant de fois qu’il y d’âmes en enfer, je souffrirais pour chacune d’elle comme je
souffris alors pour toutes ; mon corps serait encore tout disposé à endurer tous ces tourments.
» (Liv.VII, ch. XIX.)
5. L’amour de Dieu pour nous est fort, éternel, plein d’ardeur
O Seigneur, disait Mechtilde de Magdebourg, aimez-moi beaucoup, aimez moi souvent,
aimez-moi longtemps… Elle entendit cette réponse : Que je t’aime souvent, cela est dans ma
nature, car je suis moi-même l’amour. Que je t’aime fortement, c’est selon mon désir, car je
veux être fortement aimé. Enfin que je t’aime longtemps, cela est du ressort de mon éternité,
car je suis sans fin. » (Liv. IV, ch. V.)
Sainte Mechtilde vit le Seigneur ouvrir la plaie de son très doux Cœur, et il lui dit : «
Regarde toute l’étendue de mon amour pour le bien connaître ; tu ne pourras le trouver nulle
part plus clairement que dans les paroles de l'Évangile car on n’en jamais entendu qui
exprimassent un amour plus fort ou plus tendre que celles-ci : Comme mon Père m’a aimé,
ainsi je vous ai aimé (Jean XV, 9), ainsi que d’autres semblables que j’ai adressées tant à mes
disciples qu’à mon Père en comblant ceux-là de mes bienfaits. (Ière part., ch. XXI.).
Un jour Notre Seigneur dit à sainte Angèle de Foligno : »Ma fille, ce n’est pas pour rire que
je t’ai aimée. » Cette parole, écrit la chère sainte, me porta dans l’âme un coup mortel, car mes
yeux s’ouvrirent, et je vis dans la lumière de quelle vérité cette parole était vraie. Je voyais les
actes, les effets réels de cet amour et jusqu’où, en vérité, il avait conduit le fils de Dieu. Je vis
ce qu’il supporta dans sa vie et dans sa mort pour l’amour de moi par la vertu réelle de cet
amour indicible qui lui brûlait les entrailles. Non, non, il ne m’avait pas aimée par moquerie,
mais d’un amour épouvantablement sérieux, vrai, profond, parfait, et qui était dans ses
entrailles. Et alors, mon amour à moi, mon amour pour lui m’apparut comme une mauvaise
plaisanterie, comme un mensonge abominable. Ici, ma douleur devint intolérable, et je
m’attendais à mourir sur place. Et d’autres paroles vinrent qui augmentèrent mes souffrances :
« Ce n’est pas par grimaces que je me suis fait ton serviteur, ce n’est pas de loin que je t’aie
touchée. » Eh bien ! moi, m’écriai-je, c’est tout le contraire. Mon amour n’a été que plaisanterie,
mensonge et affectation. Je n’ai jamais voulu approcher de vous en vérité, pour partager les
travaux que vous avez endurés pour moi, et que vous avez voulu endurer ; je ne vous ai jamais
servi dans la vérité et dans la perfection, mais dans la négligence et dans la duplicité. » (Hello,
ch. XXXIII ; Doncœur, p.240 ; Ferré, p. 341.)
Une nuit que sainte Mechtilde se trouvant éveillée saluait le Seigneur du plus profond de
son cœur, elle Le vit venir à elle du palais du ciel et lui dire en plaçant son Cœur divin sur son
propre cœur : « Une abeille ne se précipite jamais dans les prés verdoyants pour y butiner
parmi les fleurs avec plus d’avidité que je suis prêt à venir dans ton âme quand elle m’appelle. »
(IIe
part., ch. III.)
Un jour, la même sainte s’inclinant sur le sein de son Bien-aimé entendit à l’intérieur du
Cœur divin résonner comme trois battements : « Ces trois battements, lui dit le Seigneur
marquent trois paroles que j’adresse à l’âme aimante. La première est : viens, c'est-à-dire
sépare-toi de toutes les créatures ; la seconde est : entre, avec la confiance d’une épouse ; la
troisième : dans le lit nuptial qui est le Cœur divin. » (Ire part., ch. XX.)
6. L’amour de Dieu pour nous est d’une profondeur infinie.
Il m’arriva, raconte Marcelline Pauper20, qu’étant au lit une voix forte m’éveilla, me disant : «
Lisez. » Je vis une grande lumière et une main qui me présenta ce mot écrit en lettres d’or :
« amour ». Je considérai fort attentivement l’ O qui se trouve au milieu de ce mot, dont la figure
était très parfaite. La voix me dit : « Considère » et je vis dans cette main écrit de même en
caractères d’or : Croix, l’O également au milieu d’une beauté infinie et il me fut dit : « L’un
s’éprouve par l’autre. » (Vie, ch. VI.)
7. Le cœur de l’homme fait les délices de Jésus
Le Cœur de Jésus se révélait à sainte Mechtilde : « Rien ne me donne autant de délices
que le cœur de l’homme, dont je dois toutefois souvent me passer. J’ai tous les biens en
abondance, le cœur de l’homme seul m’échappe souvent. » ( IVe
part., ch. XXXIV.)
8. Les maux comme les biens viennent de l’amour
Notre-Seigneur, dit Sœur-Marie-aimée de Jésus21, me montra qu’il m’avait créée pour lui en
me plaçant dans le chœur de ses vierges ; que de même que dans la cire une partie est
recueillie pour brûler devant son tabernacle, et l’autre pour des usages vulgaires, de même il
m’avait attirée dans le cloître afin que son amour me consumât en sa sainte présence. Puis Il lui
découvrait de combien de maux elle eût été affligée en cette vie, si elle avait eu le malheur
d’être assez ingrate pour Lui préférer une créature ; et elle comprit que la vengeance de ce
céleste Epoux eût été une vengeance d’amour dans le seul but de la ramener à Lui. Et NotreSeigneur
lui dit : « Si l’épouse infidèle eût été si ardemment aimée, combien penses-tu que doit
l’être l’épouse fidèle ? »
9. L’amour souffre de ne pouvoir donner
Étant à l'Église devant le Saint Sacrement, raconte Madeleine Vigneron, Notre-Seigneur me
fit connaître que le refus des grâces Lui est insupportable, car Il n’est dans le Saint Sacrement
que pour les communiquer. Ne trouvant personne sur qui décharger son amour, cet amour est
comme un feu renfermé qui Le consumerait entièrement s’il en était capable et qui Lui causerait
beaucoup plus de souffrances que son Père ne Lui en avait envoyé sur la croix. (Vie, IIe
part.,
ch XV)
10. Jésus est heureux d’avoir souffert pour nous
La vigile de sainte Claire, Marguerite de Cortone22 après avoir reçu dévotement le corps du
Fils de Dieu, l’entendit lui dire : « Fille bénie, pour l’amour de qui j’ai pris un corps dans le sein
de la bienheureuse Vierge Marie, qu’elles soient bénies, ces peines auxquelles je me suis
soumis pour toi ! Qu’elle soit bénie aussi mon Incarnation. Bénis soient également les travaux
que j’ai endurés ! Béni soit enfin l’amour qui m’a uni aux hommes ! Je compte peu de justes en
ce moment parmi mes enfants par rapport au nombre des méchants. N’en eussé-je qu’un seul
dans le monde, je bénirais à cause de lui toutes les souffrances que j’ai endurées. » (Sa vie,
par son confesseur, traduction Brivain, ch. V, § 44.).
20Marcelline Pauper (1663-1708) entra dans l’institut des Sœurs de la Charité de Nevers, cinq ans après sa fondation ;
elle y vécut très saintement et fut très favorisée du Seigneur. Sa vie, écrite par elle-même, fut publiée par le P. Bouix,
S.J., Nevers, 1871
21Sœur Marie-Aimée de Jésus, carmélite de Paris, vécut de 1839 à 1874. Sa vie a été publiée par les Carmélites exilées à
Natoye, province de Namur, Belgique.
22Sainte Marguerite de Cortone (1247-1297), après avoir vécu neuf ans dans le désordre, se convertit (1273) et répara
les fautes de sa jeunesse par une pénitence héroïque. Après sa mort, de nombreux et éclatants miracles furent opéré par
son intercession. Son confesseur, le P. Giunta Bevegnati, a écrit sa vie intime (Traduction par l’abbé Brivain, Lyon,
Nouvellet, 1900.)
Notre bon Sauveur me dit, raconte Julienne de Norwich23 : » Vois combien je t’ai aimée. »
Ce qui était me dire : ma bien-aimée vois donc, moi qui suis ton Seigneur et ton Dieu, ton
créateur et ton bonheur sans fin, quelle satisfaction et quelle joie je trouve dans ton salut, et par
amour pour moi, réjouis-toi avec moi. Je t’ai aimée à ce point qu’avant de mourir pour toi, je le
désirais ardemment. Et maintenant que je l’ai fait, après avoir souffert volontiers tout ce que j’ai
pu souffrir, mes souffrances les plus affreuses sont changées en une joie, en un bonheur
éternel pour toi comme pour moi. Comment pourrait-il se faire que si tu me demandes n’importe
quoi de ce qu’il te plaît, je n’éprouve pas un grand plaisir à te l’accorder. » (Xeme Révélation,
trad. Meunier, p.96.)
« Es-tu contente de ce que j’ai souffert pour toi ? » dit à Julienne de Norwich le bon
Sauveur. « Oui mon bon Maître, soyez-en béni. » « Eh bien si tu en es satisfaite, je le suis
encore davantage ; c'est pour moi une joie, un bonheur, une satisfaction sans fin d'avoir enduré
ma passion pour toi, et si je pouvais souffrir encore plus, je le ferais. (Ch. 22.)
Il est heureux parce que ses souffrances sont la cause de notre bonheur : « Tant que j’ai
été sur la terre, a-t-il dit à Marguerite de Cortone, mon corps n’a pas eu un seul jour de bonheur
complet, et pourtant j’enivre ici-bas mes amis des joies célestes en leur donnant le repos et la
paix. « (Vie intime, IX, 38.)
11. L’amour de Dieu est gratuit
La Mère Françoise de la Mère de Dieu24 étant un jour dans un profond sentiment de sa
bassesse et de son indignité, disait à Notre Seigneur : Vous savez ce que je suis ; que ne
faites-vous vos miséricordes à des âmes qui vous soient fidèles, pourquoi vous arrêter à un si
chétif rien ? Il lui dit : « Je sais bien que vous n’êtes rien, et ce n’est pas à cause de ce que
vous êtes, mais parce que vous avez dérobé mon cœur. Oui, par ma seule bonté, je me suis
laissé dérober mon cœur, et parce que par ma miséricorde, je me suis établi en vous, je ne puis
rien vous refuser. » (Vie. Ch. XIII, P 186.)
Une autre fois, le Seigneur lui dit : « Celles auxquelles je veux me donner ne doivent pas
penser qu’elles sont mieux disposées que les autres, mais je veux me donner à elles pour les
exciter à m’aimer et me servir plus fidèlement. Quand je suis venu sur la terre, je n’y ai trouvé
que pécheur et péchés, et je n’ai pas laissé de venir pour les attirer à moi. Ainsi, quoiqu’il y ait
de l’imperfection dans une âme, je ne laisse pas de me donner à elle pour l’attirer par ma bonté.
« (Vie, ch. XXVIII, p .384.)
12. Dieu aime certaines âmes d’un amour de préférence
Dieu dit un jour à sainte Véronique Juliani : « Je t’ai choisie pour ma plus grande gloire. Ce
qui te manque, je le suppléerai par ton amour. Je veux te faire tant et de si grandes grâces, que
tu deviennes un incendie d’amour : tu seras embrasée et tu communiqueras tes ardeurs au
prochain comme je le voudrai ; et j’opérerai tout par ton intermédiaire. Mais je te fais savoir que
désormais je ne veux plus d’ingratitude, mais fidélité et pur amour. » (Diario, 10 giugno 1699.)
Combien d’âmes aimées d’un amour de prédilection, prévenues de grâces de choix, ne
répondent pas aux desseins de Dieu !
13. La fidélité rend l’âme plus chère à Dieu
A une personne, très vraisemblablement sainte Gertrude qui nous a transmis ce fait, qui
priait pour sainte Metchilde le Seigneur dit : Ma bien-aimée pour qui tu m’as si souvent rendu
des actions de grâce, entre les vertus insignes qu’elle possédait, m’a plu surtout pour les
suivantes : pour son parfait renoncement à elle-même, pour l’union parfaite de sa volonté et de
23Julienne de Norwich fut une sainte recluse, dont la vie qui dura un siècles s’écoula dans la ville de ce nom, en
Angleterre (1342-1442). (Révélations, London, 1902; traduction de P. Meunier, O. S. B.,Paris, Oudin, 1910.)
24La mère Françoise de la Mère de Dieu (1615-1671), religieuse d’une sainteté éminente, fut supérieure des Carmels de
Dieppe et de Pont-Audemer. Vie, Paris Lecoffre, 1906.)
la mienne, car elle n’a jamais voulu que l’accomplissement de ma volonté et toutes mes œuvres
et mes jugements avaient toujours son assentiment. Ensuite elle était très compatissante,
portant secours et consolation avec une admirable affection à tous les affligés. Quatrièmement
elle aimait absolument le prochain comme elle-même et de toute sa vie elle n’a fait aucun mal
au prochain. Cinquièmement elle eut un cœur tranquille et pacifique et jamais elle ne permit
qu’il y séjournât rien qui pût troubler mon repos en elle… rendez-moi grâces pour tout le bien
que j’ai opéré et opère encore en elle et que j’opérerai dans toute l’éternité, spécialement pour
ces délices et ce doux repos que j’ai goûtés en elle, pour ce courant de félicité que j’ai versé en
elle, pour la sainte opération de mon Esprit en elle, et pour la parfaite jouissance qui me
permettait de goûter en elle mes délices les plus chères25. » (Ve
part., ch.XXVI.)
14. Jésus intercède près de son Père pour l’âme imparfaite et indifférente
Dans sa jeunesse la vénérable Élisabeth Canori26 bien que remplissant fidèlement ses
devoirs de religion n’était pas pieuse. Plus tard, comme elle demandait à Jésus : Mon bien-aimé
Jésus, que pensiez-vous quand j’étais si éloignée de vous ? Peut-être pensiez-vous à
m’écraser des foudres de votre justice. Et Jésus, dit-elle, lui répondit : « Non, ma chère fille ; je
plaidais ta cause auprès de mon Père avec autant d’instances que si ma félicité eût dépendu de
la possession de ton amour. » ( Ch. III..)
Une autrefois Il lui déclara que ses ingratitudes n’avaient ni diminué, ni altéré l’amour qu’Il
avait toujours eu pour son âme et ne l’avait pas empêché de Lui accorder toutes les grâces qu'Il
lui aurait accordées si elle eût correspondu fidèlement. (Ch. XXXV.) Il lui avait donc été donné
de regagner par sa générosité les pertes qu’elle avait faites.
I. Tendresses de Jésus
15. Le Seigneur se plaît à nous redire son amour
Toutes les fois que la vénérable Esprite de Jésus27, du Tiers-Ordre de Saint-Dominique,
prononçait le très saint Nom de Jésus, elle croyait entendre ce doux Sauveur lui répondre dans
le fond de son cœur : « Je te regarde toujours ! « et lorsqu’elle disait : « Où êtes-vous, mon
Dieu ? « elle croyait entendre la même voix lui dire : « Je suis dans ton cœur, mon amour ! »
Quand elle élevait les yeux vers le ciel, Dieu la remplissait d’une pensée très vive de l’amour
qu’il avait pour elle ; elle croyait alors intérieurement ces paroles du prophète : « Je t’ai aimé de
toute éternité ! »
Lorsqu’elle se sentait triste à la vue de ses misères, elle croyait que Jésus lui disait : « Je
t’aime de tout mon cœur. » Un jour après la sainte communion, son âme étant pénétrée de la
pensée de l’amour qu’avait pour elle son Sauveur, Il lui dit : « Mon épouse, ma fille, mon cœur
est à toi, mon cœur t’aime, tous les anges te regardent, et ils sont ravis de voir l’amour que j’ai
pour toi ! » Ch. X.)
Comme sainte Gertrude s’étonnait que Jésus la comblât de ses faveurs et de ses largesses
divines, elle si peu digne, le Seigneur lui dit : « L’amour m’a forcé. » (Liv. III, ch. XVI)
25Sainte Gertrude qui a rédigé le livre des Révélations de sainte Mechtilde, nous y rapporte que le jour où mourut sa
sainte amie, pas une seule âme chrétienne dans le monde entier ne descendit en enfer. Les méchants, ou bien s’ils
décédèrent en ce jour, obtinrent la contrition par les mérites de cette âme si heureuse et si chérie de Dieu, ou bien, s’ils
étaient si pervers et si endurcis qu’ils résistèrent à toute grâce, le Seigneur ne permit point qu’en ce jour leurs âmes
sortissent de leur corps pour ne pas laisser un si terrible jugement s’exercer dans un jour de si grande solennité et d’une
si grande joie pour son cœur. (Sainte Mechtilde, VIIe part., ch. XV.)
26La vénérable Elisabeth Canori vécut à Rome (1774-1825) et se sanctifia dans l’état du mariage. (Biografia da Antonio
Pagani, Roma, 1911.)
27Esprite de Jésus vécut à Carpentras (1628-1658). (Vie, par Jean Dupont, publiée par le P. Potton, Paris, Poussielgue,
1862.)
16. Comment Jésus prend ses complaisances dans l’âme fidèle
Elles sont touchantes les louanges adressées par Jésus à Sœur Mechtilde : « Tu es une
lumière devant mes yeux, tu es une lyre à mes oreilles, tu es la voix de mes paroles, tu es
l’honneur de ma sagesse, tu es une vie dans moi vivant, tu es une louange dans mon
existence. » Liv. IV, ch. IX.) Et une autre fois : Tu es mon désir, tu es le sentiment de mon
amour, tu es un doux rafraichissement pour mon sein, tu es un baiser puissant de ma bouche,
tu es la joie délicieuse de mes merveilles. Je suis en toi et tu es en moi ; nous ne pouvons être
plus rapprochés, car nous sommes tout deux fondus et passés en une seule forme et nous
resterons ainsi éternellement sans nous lasser jamais. » (Liv. IV, ch. X.).
« Je t’ai désirée avant le commencement du monde ; je te désire et tu me désires. Quand
deux désirs ardents se rencontrent, c’est l’amour parfait. » (Liv. VII, ch. XVI.).
17. Jésus prend ses délices dans tout ce que ses bien-aimés font pour Lui
Sainte Gertrude disait au Seigneur : « Je ne puis rien trouver sur la terre en quoi je puisse
me plaire, sinon vous seul, mon Seigneur si doux. » « Et moi, répondit le Seigneur, je ne trouve
au ciel et sur la terre aucunes délices sans toi, parce que je t’associe par l’amour à toutes mes
joies en sorte que je ne jouis d’aucune douceur que je n’en jouisse avec toi ; car plus il y a pour
moi de douceur, plus il y a pour toi de fruit. » (Liv. Ier, ch.XI.)
« Mon amour s’est tellement enlacé en toi que je ne puis vivre heureux sans toi…Celui qui a
toujours été privé d’un membre, n’en éprouve pas de douleur, comme celui à qui on le coupe
lorsqu’il a grandi ; aussi depuis que j’ai placé mon amour sur toi, je ne pourrais souffrir que nous
fussions séparés. » (Liv. III, ch. V.) « L’œil de ma divinité se plaît d’une manière ineffable à
s’arrêter sur toi, que j’aie crée si belle et si agréable en tout par tant de grâces et de faveurs
dont je t’ai enrichie. Mon oreille reçoit comme les sons de la plus douce harmonie, toutes les
paroles d’amour que tu m’adresses quand tu me pries pour les pécheurs ou pour les âmes du
purgatoire, ou que tu reprends, ou que tu instruis, ou que tu profères de quelque manière que
ce soit une parole pour ma gloire. Quand même il n’y aurait aucune utilité pour personne ou
aucun résultat, toutefois à raison de ta bonne volonté et de l’intention pure qui n’a que moi pour
objet, cela résonne avec suavité dans mes oreilles et vient m’émouvoir jusqu’au fond de mon
divin Cœur. L’espérance aussi qui te fait sans cesse soupirer après moi exhale pour moi une
odeur délicieuse. Tes gémissements et tes désirs sont à mon goût plus agréables que les mets
les plus exquis. Enfin je trouve dans ton amour les charmes des embrassements les plus doux.
» (Liv.III, ch. I.) Une nuit que Gertrude, forcée par la maladie, n’avait pu rester que fort peu de
temps à Matines : Que peut-il vous revenir de gloire, mon Seigneur dit –elle, des courts instants
qu’une indigne comme moi a pu consacrer aux divins offices ? Quel avantage, lui fut-il répondu,
un époux peut-il retirer des tendresses que son épouse pendant l’espace d’une seule nuit lui
prodigue pour contenter son propre cœur ? Or aucun époux n’a jamais pu trouver autant de
charme aux caresses de son épouse que je n’en goûte même dans le court instant où mes élus
me donnent leur cœur pour que je me délecte avec eux. » (Liv. IV, ch. XXXVIII.)
18. Aime-moi, puisque je t’aime
Marguerite de Cortone, toute confuse des paroles de tendresse que Jésus lui adressait,
s’en regardait comme très indigne et disait : « Si ces paroles flatteuses que je viens d’entendre
sont celles de l’ennemi qui se transforme en ange de lumière, je t’ordonne de cesser de parler
et de t’éloigner. » « Celui qui te parle, répondit Jésus, est Celui que tu as crucifié, Celui qui t’a
ressuscitée de la mort du péché, Celui qui t’appelle aux amertumes de la pénitence, par
lesquelles l’âme se purifie de toute souillure. Moi, ton Rédempteur, que tu aimes et que tu
recherches en tout, je te dis que tu es ma fille bien-aimée , que je veux t’enrichir des dons les
plus précieux de ma grâce à ce point que nulle femme de ton temps n’en a encore reçu de si
grands…Aime-moi donc, puisque je t’aime. Publie mes louanges et je te louerai et te ferai louer
dans le monde entier…Toutes les grâces que tu as reçues jusqu’à ce jour ne sont rien en
comparaison de celles que je te réserve, car l’œil ne saurait voir, le cœur n’oserait penser ni
croire aux grâces sublimes que je me dispose à t’accorder… Ma fille, mon Père t’aime, ma
Mère et tous les saints aussi…Tu es ma fille, parce que tu m’obéis. Tu es mon épouse, parce
que je suis ton seul amour; tu es ma Mère parce que tu accomplis dans la mesure de tes forces
les volontés de mon Père et j’ajoute que sur la terre il n’y en a pas que j’aime plus que toi.
Cependant que ces paroles ne te remplissent pas de présomption, car ces consolations tu ne
les a pas encore achetées ; un temps viendra ou tes souffrances t’apprendront le prix que m’a
coûté ton salut. » « Seigneur Jésus, pourrai-je supporter ces peines ? » « J’en ai souffert de
plus grandes pour toi, ma fille », répondit Jésus. (Vie intime, ch. IV, § 3, 7, 8.)
19. Les invitations affectueuses de l’Epoux divin.
Jésus dit à sainte Véronique Juliani : « Je suis ton Epoux. Quand donc te décideras-tu à
m’aimer véritablement ? Je suis tout à toi ; je viens à toi pour t’attirer en moi ; je viens à toi pour
faire une seule chose avec moi ; je viens à toi pour te transformer toute en moi. » (Diario, 18
giugno 1697.)
Le Seigneur, dit la bienheureuse Marie-Madeleine Martinengo28, dans son infinie bonté
m’adressait intérieurement des paroles d’une céleste douceur. Si, transpercée de douleur pour
mes péchés, je Lui demandais pardon, Il me répondait dans le sanctuaire intime de mon cœur :
« Ma fille, tu as été déjà purifiée dans mon sang. » Si je Lui demandais sa sainte dilection, je
voyais s’ouvrir son divin Cœur. Il plaçait dans cette fournaise d’amour mon cœur qui restait
enflammé de saintes ardeurs. Si je lui disais : Mon Dieu, je suis toute à vous, Il me répondait : «
Et moi, ma fille, je suis tout à toi. » A chaque parole que je lui adressais, j’entendais en retour
des paroles de vie éternelle qui me liquéfiaient de douceur. Elle n’était encore que
pensionnaire. (Vie, ch. II.)
Le vénérable Bernard-François de Hoyos29 ayant passé par des épreuves intimes très
pénibles, reçut, le 15 août 1730, la faveur du mariage spirituel : « Désormais, lui dit le Seigneur,
tu es à moi et je suis à toi ; tu peux te dire et signer Bernard de Jésus ; tu es Bernard de Jésus
et je suis Jésus de Bernard ; mon honneur est le tien, et ton honneur est le mien. » (Vida, ch.
XII.)
« Ma fille disait le Seigneur à la bonne Armelle30, tu est la fille de l’amour. »
Jésus dit à Sœur Saint-Martinien31 , le 17 octobre 1861, après la sainte communion : « tu es
mon épouse, tu es ma fille, tu es chère, oui, bien chère à mon Cœur ; ma Mère et mes saints
t’aiment ; mon Père et l’Esprit-Saint te voient ; ils contemplent avec plaisir le triomphe de ma
grâce en toi. Je t’aime, mais aime moi bien, toi aussi. Ne crains pas, je serai toujours avec toi ;
mais sois-moi bien fidèle. Fais connaître tout à ton père spirituel et obéis en tout et partout.
Demande-moi ce que tu voudras, car je suis ton Epoux, mais aussi ton Créateur, ton Dieu, ton
Père ; demande, ne crains pas. »
Une autre fois, le 1er novembre 1861, Jésus lui dit encore : « Aime-moi et je t’aimerai ; si
mon Cœur a besoin d’être aimé, le tien en a aussi besoin. Prends part à mes peines et je
prendrai part aux tiennes. »
28La bienheureuse Marie-Madeleine Martinengo (1687-1737) fut une clarisse capucine du monastère de Brescia ; elle a
été béatifiée par Léon XIII, le 3 juin 1900. (Vie par le R.P Ladislas, de Vannes, Paris, Poussielgue, 1901)
29Le vénérable de Hoyos (1711-1735), de la Compagnie de Jésus, fut un grand apôtre de la dévotion au Sacré-Cœur, qu’il
contribua à répandre dans l’Espagne. (Vida, por el Padre Vicente Agusti, Barcelona, 1896.)
30Armelle Nicolas (1606-1671) était une humble servante qui passa la plus grande partie de sa vie à Vannes où elle mourut
en grande réputation de sainteté.
31La Sœur Saint-Martinien (1831-1862), religieuse de la Congrégation de Saint Charles d’Angers, passa sa vie dans le soin
des malades. Elle pratiqua d’héroïques vertus. On a publié deux petits volumes de ses lettres à son directeur. (En vente à
la Communauté de Saint Charles, Angers.)
20. Ma bien-aimée est à moi et je suis à elle
Jésus adressait parfois à Sœur Marie-Josèphe Kumi32 des paroles d’une ineffable tendresse
: « J’ai une épouse qui demeure cachée en mon Cœur et qui est au gré de mon Cœur ; elle a
ma forme ; elle est vêtue de la couleur de mon vêtement, elle tient les clefs à la main, et en
véritable épouse, elle règne sur les inépuisables trésors de ma charité. Les flèches de son
amour blessent mon Cœur. Le sien est toujours ouvert pour que je puisse y venir à volonté et
me soulager par sa tendresse des injures que je reçois des hommes. La bonne volonté de son
cœur m’a tellement charmé que je l’ai faite maîtresse de mes trésors ; elle est enrichie de l’or
de mon pur amour ; plongée dans la mer insondable de la paix, et pourtant elle ne s'y abreuve
pas (c'est-à-dire elle ne recherche pas sa satisfaction) ; elle se trouve sur la terre et ne la
touche pas, parce qu’elle n’y est attachée à rien. Elle ne voit pas le ciel, parce qu’elle agit moins
pour lui que par amour. Elle s’élève chaque jour plus haut dans la perfection de l’amour parce
qu’elle s’abaisse dans son néant. Elle est imprimée dans mon Cœur et moi dans le sien. » (Vie,
ch. IX.)
21. Le duel d’amour
Dans une lettre à sainte Jeanne de Chantal, le P. Galice, barnabite, raconte un combat
mystérieux qui s’était engagé entre le divin Maître et sa fidèle servante Anne-Marguerite
Clément33 dont il était le directeur : Notre-Seigneur vint assaillir son cœur de la plus vive
blessure d’amour qu’elle eut encore éprouvé et il lui dit : « Je veux t’enrôler dans ma milice, je
veux te couvrir de mes armes… Je veux t’apprendre à devenir habile au combat, non pas
contre le monde et le diable ; ce sera contre moi-même que tu te serviras de mes propres
armes ; il faut que nous entrions dans la lice pour combattre à nous deux. » Il lui montra ensuite
une armure complète et se servit des armes dont parle saint Paul pour lui en donner
l’explication. « L’amour doit commencer cette guerre, continua le divin Maître, le même amour
la poursuivre et ton pauvre cœur l’achever. Je ne veux point d’autre but à mes coups que ton
cœur même. Je prétends le faire mourir d’amour. » Puis comme un habile archer Il lança trois
flèches brûlantes du feu de son amour dans le cœur de sa servante, qui crut qu’elle en perdrait
la vie…Mais le combat n’était pas achevé ; elle devait combattre à son tour. Jésus donc lui
ordonna de se remettre sur pied et de porter des coups à son Cœur divin. « Voici ton blanc, ditIl
en lui montrant ce Cœur ? et le but de tes flèches. » Cette jeune guerrière, se sentant peu
habile, faisait résistance : Quoi Seigneur, blesserai-je votre divin Cœur. Avec quelles armes
puis-je le faire ? « Tes flèches, repartit Jésus, ne sont autres que les mouvements de ton amour
envers moi ; aime-moi donc et tu blesseras mon Cœur. » Elle le perça en effet par la force de
l’amour que l’amour même alluma en elle et fit une ouverture suffisante pour se cacher dans ce
Cœur adorable, où Jésus l’unit à Lui. (Vie, de 1915, p. 279.)
Une autre fois, c’était la veille de la fête de la conversion de saint Paul, son divin Epoux lui
dit : « Tu me persécutes plus violemment que Saul, mais bien différemment, car tu me
persécute par la violence de l’amour ; tu ne me donnes point de repos… Tu as blessé mon
Cœur par la pointe de tes désirs et par les flèches de tes amours ; tu as été si impitoyable que
tu m’as blessé de toutes parts. » Elle vit le Cœur divin tout couvert de plaies, dont une était
assez grande pour lui donner entrée. Elle y fut tirée par cet Amant victorieux…Le lendemain
Jésus revenant à elle, lui dit : « Je veux à mon tour entrer dans ton cœur et y amener toute la
Trinité. » Et le Père y prit place, ainsi que le fils et le Saint Esprit. (Ibid., p. 438.). Jésus lui dit
encore : « Je suis un aigle royal qui ne se nourrit que de cœurs. » (p. 413.)
32Marie-Josèphe Kumi (1763-1817), religieuse dominicaine du couvent de Wesen, au diocèse de Saint-Gall, en Suisse, y
mena une vie admirable d’humilité, de pénitence et d’amour. Sa vie a été publiée en 1906, par Masson, Lyon, Vitte.
33La mère Anne-Marguerite Clément (1593-1661) fut reçue en 1617 dans l’ordre de la Visitation, à Annecy, 1 par saint
François de Sales et sainte Jeanne de Chantal. Formée par ces deux grands serviteurs de Dieu, elle mena une vie très
sainte et fut l’une des plus remarquables religieuses de l’ordre naissant. Elle fonda les monastères de Montargis et de
Melun. (Vie, par les Visitandines, Paris, 1686 ; nous avons donné une nouvelle Vie en 1915, Paris, Téqui.)
22. Jésus à ses intimes agonisants
Peu de temps avant de mourir, Angèle de Foligno dit à ceux qui l’entouraient : Jésus Christ,
Fils de Dieu, m’a présentée au Père. (Ferré, p. 515 ; Doncœur, p. 349.) Et plus tard elle entendit
ces paroles : « O mon épouse, ô toute belle, ô toi que j’ai aimée en vérité, je ne veux pas que tu
viennes à moi chargée de douleurs, mais parée de la joie inénarrable. Il convient au roi de
revêtir celle qu’il aima depuis longtemps d’un manteau royal. » Et on me montra un manteau de
lumière, capable de vêtir une âme… Et le Verbe me dit : « Viens, ma bien aimée, que j’ai aimée
d’un grand amour ; viens, car tous les saints t’attendent en grande joie. Je ne te confierai ni aux
anges ni aux saints ; je viendrai en personne et je t’enlèverai moi-même. Tu es telle qu’il faut
pour me convenir ; tu es très haute devant ma Majesté. » (Hello, ch.LXX ; Doncœur, p. 352 ;
Ferré, p. 519.)
- E senti o espírito inundado por um mistério de luz que é Deus e N´Ele vi e ouvi -A ponta da lança como chama que se desprende, toca o eixo da terra, – Ela estremece: montanhas, cidades, vilas e aldeias com os seus moradores são sepultados. - O mar, os rios e as nuvens saem dos seus limites, transbordam, inundam e arrastam consigo num redemoinho, moradias e gente em número que não se pode contar , é a purificação do mundo pelo pecado em que se mergulha. - O ódio, a ambição provocam a guerra destruidora! - Depois senti no palpitar acelerado do coração e no meu espírito o eco duma voz suave que dizia: – No tempo, uma só Fé, um só Batismo, uma só Igreja, Santa, Católica, Apostólica: - Na eternidade, o Céu! (escreve a irmã Lúcia a 3 de janeiro de 1944, em "O Meu Caminho," I, p. 158 – 160 – Carmelo de Coimbra)