5-2-La sainte Messe
5-2-1-C’est l’Œuvre de Notre Seigneur Jésus-Christ
“Le saint sacrifice de la croix a été l’œuvre du plus grand
amour de Jésus-Christ, et ainsi la plus importante de sa vie. C’est pourquoi il
désira s’y préparer avec toute la dévotion et toute la solennité possibles, et
se mit en oraison, où il souffrit beaucoup... Cette conduite de Notre Seigneur
est un exemple qui montre aux chrétiens, premièrement, que dans toutes les
affaires importantes il est bon de prendre un temps pour s’y préparer en esprit,
afin de les exécuter ensuite avec fidélité et sainteté nonobstant les obstacles
et les difficultés qui s’y peuvent rencontrer. Et secondement qu’il est très
utile de prévenir les moments d’impuissance, où l’on est réduit à l’agonie, afin
de s’offrir à Dieu par avance en sacrifice, et d’accepter ses jugements avec
toute la dévotion, tout l’amour et toute la religion que nous devons avoir...”
5-2-2-Nos sentiments envers Notre Seigneur Hostie
“Je m’offre à vous, mon Père, pour en faire le sacrifice (de ma
vie) et pour souffrir l’anéantissement auquel vous me pouvez réduire à tous
moments... Je me livre à vous, je me soumets à votre jugement, et suis prêt à en
subir la peine à l’heure que vous voudrez...
Mon Dieu et mon Père, j’adore votre toute puissance et le droit
que vous avez de détruire l’ouvrage que vous avez produit. Nous savons que vous
nous pouvez casser comme un potier casse un vase d’argile; rien ne peut résister
à votre toute puissance...
Mon Dieu et mon Père, j’adore votre saint amour qui souffre avec
peine l’exil de ses enfants... car notre exil est dur. Retirez-nous de nous et
de toute la créature; tout notre désir est d’être sacrifiés et consommés dans
votre sein d’où nous sommes sortis par votre amour, et où nous désirons
retourner par votre même charité... Créez en nous un cœur nouveau; le nôtre est
un fonds inépuisable d’impuretés: il est tout pétri
d’amour-propre...”
5-2-3-Intentions pour lesquelles on offre le saint sacrifice chaque jour de la semaine
Parmi les intentions citées par J.J. Olier, on peut en retenir
quelques-unes plus importantes:
“Il faut s’abîmer en Jésus-Christ, priant pour son Église, et
demander avec lui tout ce qui manque, et au général, et au particulier, comme
l’humilité pour les uns, la patience pour les autres, la douceur pour ceux-ci,
pour ceux-là la pénitence... Il faut se perdre dans les reconnaissances (du Fils
de Dieu), dans sa gratitude, dans ses remerciements, dans sa joie et dans son
amour... Il faut offrir le sacrifice dans les intentions du Fils de Dieu mourant
et satisfaisant à son Père pour tous les crimes du monde; engendrant son Église
sur la croix, lui méritant la grâce du saint crucifiement de la chair et celle
de la mort à tout ce qui n’est pas Dieu...” Il faut ofrir le saint sacrifice
dans les intentions de la Très sainte vierge, et le lui mettre entre les mains,
afin qu’elle l’offre à Dieu, comme elle sait bien le faire...”
5-3-La communion
5-3-1-La préparation
Comment nous préparer “pour être dignes de posséder Dieu?”
J.J. Olier évoque successivement Marie, le vieillard Siméon, les prophètes
pleins d’humilité et de charité, et qui ne pensaient qu’au salut du genre
humain. D’où l’instante prière :
“Venez donc en nous, ô Seigneur, pour la gloire de votre Père.
Venez anéantir en nous l’empire de Satan, son ennemi juré. Venez anéantir en
nous cette chair de péché en ses mauvais désirs et en ses misérables attaches.
Venez établir en nous le royaume de Dieu le Père, et faites que tout lui soit
obéissant en nous. Venez, ô mon Dieu, anéantir tout mon vieil homme, et vous
établir en sa place...
Venez en moi, et m’attirez à vous, et me changer en vous; et
ainsi soyez en moi, et moi en vous, comme votre Père est en vous, et vous en
votre Père. Venez vivre en moi, et que je ne sois plus moi, que je sois si
intimement en vous, que je ne sois qu’un avec vous.
Je ne puis vivre sans vous; venez donc en moi vivifier mon âme
qui se consomme toute en votre amour; qu’ainsi par vous je glorifie votre Père,
par vous je serve tous mes frères et les remplisse de vous; et qu’ainsi tout en
vous, je puisse continuer votre vie... ”
5-3-2-La prière d’adoration à la sainte Trinité
“Je vous adore, essence de mon Dieu, qui remplissez de votre
auguste majesté les trois personnes adorables de la très sainte Trinité.
Je vous adore, Majesté souveraine, cachée sous cet adorable sacrement, et qui
venez par Jésus-Christ vous donner à nous. Je vous adore trésor
immense...
Qui vous peut dignement recevoir, ô suprême grandeur! Ô sainteté
incomparable de mon Dieu! Vous êtes bien selon votre dignité, dans les trois
personnes divines; mais venant parmi nous, qui sera la personne digne de vous
recevoir?...
Le Fils dans la communion se fait don des hommes et rend aussi
son Père un véritable don. Celui qui faisait tous les dons, donnant son Fils et
son Saint-Esprit, et de qui tout don descend, devient lui-même notre don en la
très sainte communion... Nous recevons en nous les dons que le Père fait au
Fils, les dons que le Père et le Fils font au Saint-Esprit...”
5-3-3-Jésus nous transforme en lui:
Jésus nous poursuit intérieurement, et J.J. Olier
s’écrie :
“Vous me pressez et vous venez vous insinuer en toutes mes
puissances; plus je recule et m’éloigne de vous, plus, ô mon Jésus, vous vous
unissez à moi et vous faites un avec moi. Comme votre Père s’insinue en vous de
toute éternité, Verbe divin, en sorte qu’il vous remplit tout, et qu’il est tout
en vous: ainsi, ô mon Jésus, vous vous insinuez en moi, et vous faites une même
chose avec moi par une intime pénétration de tout moi-même...”
Mais
hélas ! où Jésus vient-il prendre sa demeure, ”dans une chair
criminelle?” D’où la supplication :
5-3-4-La supplication :
“Vous voyez quelle est la peine d’une âme qui est appesantie
dans la terre et vivante dans l’impureté d’une vie grossière et animale. Vous
savez, ô mon Jésus, quelle est la condition d’une âme tirée hors du sein de
Dieu: et pour cela, ô mon Seigneur, vous êtes venu au monde pour soulager les
âmes et les remettre dans ce sein dès la vie présente. Vous portez une âme dans
le sein de Dieu quand vous êtes uni intimement à elle par la sainte
communion...”
“Mon
Jésus... je vous laisse mon âme pour opérer en elle tout ce qu’il vous plaît à
la gloire de Dieu... Anéantissez en la vertu de votre Esprit mon orgueil, mon
avarice, ma colère, ma luxure et enfin tout l’amour de moi-même. Faites-moi la
miséricorde, ô mon Seigneur, que je n’aie plus en vue que Dieu, et que je
n’agisse plus que pour lui, de même que vous faites et que vous avez toujours
fait vivant sur la terre... Soyez, ô Jésus, la vie de mon âme, pénétrez-la
intérieurement des mouvements de votre vie divine, puisque vous venez comme un
Esprit vivifiant par la sainte communion...
Opérez donc en mon âme, et la vivifiez par vous, en sorte que vous
produisiez en elle toutes les œuvres de votre vie... Que l’on voie donc qu’un
nouvel homme m’anime, qu’une nouvelle vie est en moi, qu’un nouvel esprit me
possède; bref qu’un Dieu vit en moi et me fait vivre comme lui... Que la lumière
de mon Dieu me découvre la vanité de toutes choses et la vérité de Dieu seul, et
que tout ce qui n’est point de Dieu n’est que mensonge, que figure et
qu’illusion...”
La vie spirituelle, selon J. J. Olier
4-1-L’Eucharistie
“Il faut savoir cette vérité fondamentale que Notre Seigneur est
le chef-d’œuvre de Dieu son Père... Notre Seigneur est encore le
réceptacle de toute la bonté et magnificence de Dieu sur l’Église... C’est en
lui que Dieu le Père a versé sur nous ses saintes bénédictions... Il est le
chef-d’œuvre de Dieu et le sanctuaire parfait du Saint-Esprit... Or ce feu que
le Saint-Esprit a une fois allumé, ne s’éteint jamais; et la même ferveur
intérieure qui était en Notre Seigneur sur la croix, pour se sacrifier à la
gloire de Dieu son Père et pour opérer notre salut, continue encore en lui dans
le saint sacrifice de l’autel, et continuera jusqu’à la fin du monde... C’est le
même Jésus-Christ qui est présent au saint sacrifice de l’autel, comme sur la
Croix; et ainsi ce n’est que le même sacrifice continué, et qui continuera
jusques à la fin des siècles, quoique sous un extérieur fort
différent...”
Lorsque Jésus demanda à ses apôtres de “faire ceci en mémoire de
lui,” c’était pour les avertir “qu’offrant en ce sacrifice véritable de
l’autel sa personne cachée sous les voiles du pain, ils se souvinssent de la
charité qu’il avait montrée visiblement sur le Calvaire et sur la
Croix...”
Jean-Jacques Olier nous avertit: la communion spirituelle, c’est
bien, mais “ce sacrement nous donne des grâces spéciales et plus abondantes
que celles que nous recevons hors de ce sacrement par la seule communion
spirituelle.”
Et
Jean-Jacques Olier de s’écrier: “Que je souhaiterais que les chrétiens
connussent leur bonheur, sachant qu’ils ont en eux le trésor précieux de Jésus,
dans lequel et avec lequel ils peuvent opérer tant de choses à la gloire de
Dieu!... Apprenons que, comme Jésus-Christ opérait tout en son Père et avec son
Père, il faut aussi que nous opérions tout en Notre Seigneur et avec Notre
Seigneur, parce qu’il est venu habiter en nous pour nous vivifier de sa vertu,
pour nous remplir d’une grâce capable de nous sanctifier en tout, pour rendre
toutes nos œuvres agréables à Dieu son Père, et afin que, se répandant en nous,
il serve de nourriture à nos âmes...”
4-2-L’oraison
Les
deux parties de l’oraison sont: l’adoration et la communion.
– “L’adoration... porte l’âme à l’anéantissement, à
l’admiration, aux louanges, aux remerciements, à l’amour, en un mot, à toutes
sortes de devoirs et d’hommages que nous devons rendre à Dieu en cette première
partie de l’oraison.
– Dans la communion, on se donne à Dieu pour entrer en
participation de ce qu’il est et dont il veut nous animer. La participation au
corps de Jésus-Christ s’appelle communion sacramentale, parce que ce sacrement
nous rend les biens de Jésus-Christ communs et nous communique ses plus grands
dons.
La participation qui se fait dans l’oraison s’appelle communion
spirituelle, à cause des dons que Dieu y communique par la seule opération
intime de son Esprit. L’âme qui expérimente quelque opération secrète en son
cœur se doit tenir en repos et en silence, pour recevoir toute l’étendue des
dons et des communications de Dieu, sans vouloir opérer par soi-même, ni faire
des efforts qui troubleraient les opérations pures et saintes de l’Esprit divin
en elle.”
À
ces deux parties s’ajoutent les ”résolutions qu’on peut nommer plus
proprement la coopération, qui est le fruit de l’oraison, et qui s’étend à toute
la journée.”
En
un mot, l’oraison “est un délaissement et un abandon total de soi-même au
Saint-Esprit, qui sera notre lumière, notre amour et notre
vertu.”
4-3-Le mariage spirituel
Le
Saint-Esprit de Jésus est en nous comme époux de notre âme. Il n’attend que nos
désirs et notre volonté. “Donnons-nous donc à lui pour prier par lui et en lui; il
sera notre prière...” Dans le mariage spirituel, “il faut un don et un
consentement mutuel des esprits; Jésus en l’âme, l’âme en Jésus, tous deux font
la prière qui est le fruit principal de l’alliance du Saint-Esprit de Jésus avec
nos âmes; si bien que nos prières sont comme les enfants de ce mariage
spirituel; et si vous demandez à qui est la prière, c’est à l’âme en Jésus, et à
Jésus en l’âme; et d’en vouloir savoir davantage, c’est vouloir violer le secret
de Jésus-Christ en nous, et vouloir pénétrer dans un mystère qu’il veut tenir
caché, aussi bien que celui des opérations du Père dans le fils, et du Fils dans
le Père.
À
qui appartiennent les œuvres de Jésus? est-ce au Père, ou au Fils? Elles sont et
du Père et du Fils, et Dieu ne veut pas que la créature y cherche de
distinction; c’est assez de savoir que Jésus les fait en son Père, et le Père en
Jésus et avec Jésus.”
4-4-L’union à Dieu
“Les saints ne font que dire Amen! aux prières de
l’Agneau; ce qui exprime l’union de leurs cœurs à Jésus-Christ leur prière; et
que, confessant leur incapacité pour louer Dieu en eux-mêmes, ils se perdent en
Jésus-Christ pour dire à Dieu tout ce que Jésus-Christ lui dit, et en même temps
tout ce que dit l’Église en lui.’
Comment savoir qu’on est uni à Jésus-Christ ?
Notre Seigneur est en nous, et il nous attend, les bras ouverts:
“Il n’y a qu’à le chercher en toute simplicité, et à se donner à lui pour
faire toutes nos œuvres et nos prières, avec lui, car il demeure en nous pour
être l’hostie de louange de Dieu; il nous considère comme ses temples pour le
magnifier incessamment par nous, en nous et avec nous...”
Mais
attention! Il faut savoir se contenter de la simple foi et de la seule charité.
“La pure charité avec la foi sont comme les deux animaux spirituels qui
tirent le beau chariot de l’Église... Le corps et le sang précieux de Notre
Seigneur sont comme le véhicule qui nous porte son Esprit, pour nous faire
participer à sa vie et à ses opérations divines, pour être notre nourriture,
pour faire croître en nous toutes ses vertus... enfin pour mettre en nous la
plénitude de sa vie intérieure et nous faire même parvenir à la plénitude de
Dieu.”
Il
faut s’unir sans cesse au Saint-Esprit pour faire ses actions en sainteté et
dans les sentiments mêmes de Jésus-Christ. Le fleuve de feu qui sort de la face
de Dieu (Dan, VII, 10), c’est Jésus-Christ lui-même. ”Le fleuve signifie deux
choses: la voie et la vie; car un fleuve est un chemin animé et vivant; étant
rapide et vivant, il est la figure de l’impétuosité de l’amour avec lequel nous
devons nous porter à Dieu, et de la vertu de l’Esprit qui sort de Jésus-Christ
pour entrer en nous, afin d’y être notre voie, notre vérité et notre vie. C’est
ainsi qu’il opérait dans les premiers chrétiens... poussés par
l’Esprit.”