quinta-feira, 2 de março de 2017

MERCREDI DES CENDRES Homélie du Très Révérend Père Dom Jean PATEAU Abbé de Notre-Dame de Fontgombault

 (Fontgombault, le 1er mars 2017) Scindite corda vestra et non vestimenta vestra. Déchirez vos cœurs, et non vos vêtements. (Joël 2,13) Chers Frères et Sœurs, Mes très chers Fils, ’ÉGLISE DEMANDE AU PROPHÈTE JOËL d’ouvrir la sainte quarantaine en lui empruntant la lecture de ce matin. Au terme du temps de la Pentecôte, le vendredi et le samedi dans l’octave, c’est le même prophète qui fera entendre sa voix, annonçant l’effusion du Saint-Esprit sur toute chair. Auparavant, nous aurons revécu la Pâque du Seigneur, sa mort et sa résurrection. Renonçant au mal et à Satan, nous aurons renouvelé durant la sainte Vigile les promesses de notre baptême, revivant à nouveau dans la lumière du Ressuscité notre propre pâque. L Aujourd’hui le cri du prophète n’annonce pas un bienfait divin, il est tout autre : « Revenez-à moi de tout votre cœur. »

Il ne semble pas anodin que la parole d’un même prophète, arrivée jusqu’à nous dans un petit livre de seulement quatre chapitres, se fasse entendre dans l’année liturgique uniquement à l’ouverture et à la clôture de ce grand cycle que constitue le carême, le temps pascal et le temps de la Pentecôte, semblant ainsi vouloir renforcer l’unité de cet ensemble. De fait, si nous voulons recevoir une effusion renouvelée de l’Esprit, si nous voulons que notre être soit régénéré dans le Sang de l’Agneau, alors il faut que l’invitation à la table des mystères sacrés touche réellement notre vie, qu'elle provoque des tourbillons dans le cours du long fleuve tranquille du traintrain quotidien, qu'elle nous fasse repousser les compromissions avec les habitudes mauvaises. Il faut nous convertir, c’est-à-dire réorienter radicalement notre vie : cesser le péché et faire le bien, dans la confiance en l’aide de la grâce, avec l’espérance de la miséricorde divine. La parole du Seigneur par la bouche du prophète est vive : « Revenez à moi de tout votre cœur dans le jeûne, les larmes et le deuil. » La demi-mesure n’est plus d’actualité.

 « L'appel du Christ à la conversion, souligne le Caté- chisme de l’Église Catholique, continue à retentir dans la vie des chrétiens. Cette conversion est une tâche ininterrompue pour toute l’Église qui ''enferme des pécheurs dans son propre sein'' qui ''est donc à la fois sainte et appelée à se purifier, et qui poursuit constamment son effort de pénitence et de renouvellement'' (Vatican II, Lumen Gentium 8). Cet effort de conversion n'est pas seulement une œuvre humaine. Elle est le mouvement du ''cœur contrit'' (Ps 51,19) attiré et mû par la grâce (cf. Jn 6,44 12,32) à répondre à l'amour miséricordieux de Dieu qui nous a aimés le premier (cf. 1Jn 4,10). » (n° 1428) C’est donc bien au Seigneur qu’il faut revenir... mais comment revenir ? Le prophète Joël invite le peuple à « déchirer son cœur ». Déchirer son cœur, c’est permettre au mal qui y demeure de s’évacuer, à la pourriture qui a pu y élire domicile de s’écouler. Déchirer son cœur, c’est aussi, en le plaçant sous un autre cœur, blessé par la pointe d’une lance et devenu ainsi source de vie, le laisser être lavé, irrigué, nourri, par le Sang et l’Eau qui jaillissent de cette fontaine d’amour. La réception de l’Eucharistie et du sacrement de Pénitence, la lecture de l’Écriture sainte soutiendront notre chemin de conversion et de pénitence. Par le jeûne, la prière, l'aumône, les efforts de réconciliation avec le prochain et le souci de son salut, par le recours à l'intercession des saints et la pratique de la charité, nous préparerons notre rencontre avec le Christ au matin de Pâques.

Notre course doit s’achever comme celle des saintes femmes auprès du tombeau vide, ou encore comme celle des pèlerins d’Emmaüs au cours de la fraction du pain. Dieu l’a promis par la bouche du prophète Joël : « Voici que je vous envoie le blé, le vin, l'huile fraîche. Vous en aurez à satiété. Et jamais plus je ne ferai de vous l'opprobre des nations. » (Joël 2,19) En cette année du centenaire des apparitions de Notre-Dame à Fatima, rappelons la demande de Marie aux petits bergers : « Voulez-vous vous offrir à Dieu pour supporter toutes les souffrances qu’il voudra vous envoyer, en acte de réparation pour les péchés par lesquels il est offensé et de supplication pour la conversion des pécheurs ? » Déchirer son cœur, c'est aussi lui donner de devenir source. Confiants que Marie ne manquera pas de nous accompagner de sa maternelle présence comme elle a su le faire pour son Fils et pour les petits bergers, offrons généreusement les efforts de ce carême qui commence. Stabat Mater dolorosa juxta crucem lacrimosa, dum pendebat Filius… Debout, elle se tenait en larmes, la Mère des douleurs, au pied de la croix où son Fils était suspendu. (Séquence de la fête de Notre-Dame des Sept Douleurs) Saint et fructueux Carême. Amen.